Des fragments de rouges,
des morceaux de chair,
des bouts de vie,
des parcelles de corps.
À travers la fenêtre du corps mis à nu, anonyme,
féminin, je vois l’intérieur chaud de mes organes.
Durant la nuit, des morceaux s’échappent.
a n o m a l i e (s)
qui me triture(nt) doucement l’enveloppe.
La fleur rose, parfois meurtrie, de mes seins me terrifie,
me glace, m’immobilise.
Racine noire. Silence noir.
Le vide se diffuse dans mon corps.
Il fait nuit dedans, il fait opaque, la fleur se cristallise.
Les fragments de rouges = la viande /
s’évadent et recouvrent la peau.
Je suis l’enveloppe déboutonnée de l’intérieur.
En dégrafant les boutons serrés le plus possible
de la poitrine, ils s’aperçoivent des multiples couches
qui la couvre. Momie des temps contemporains.
Femme du printemps éternel, bourgeonnant comme
un rhizome envahissant la matière granuleuse
de mon corps. Mes visions erronées par une maladie
qui n’existe peut-être pas.
La nudité, le sang, les menstruations, la douleur, la poésie,
la nature, le silence de la photographie.
Des thèmes qui m’ont animé pour ma proposition
sur l’anomalie. À travers une démarche autour du féminin,
de la nature minérale et végétale à la fois, j’ai voulu donner
à voir ce qu’on ne voit pas, ce qui est caché par une fine
couche épidermique.
vulnérable et mortelle
J’ai souhaité évoquer de manière poétique, symbolique
l’anomalie en utilisant la photographie, qui, parfois prend
des allures picturales.
Un corps féminin sans vie, stérile, sans nombril.
Cordon coupé.
Organe irrigué ou non. Blanc comme les coraux
arrachés à leur habitat naturel. Coloré lorsqu’ils vivent.
Non sans rappeler « L’écume des jours » de Boris Vian,
l’anomalie florale se propage à l’intérieur du corps féminin
rendu anonyme. Comme la métaphore du nénuphar
dans l’œuvre de l’écrivain, mes images sont empreintes
de « bipolarité, tantôt séduisantes quand on regarde
en surface, tantôt plus sombre quand on tombe dans
les profondeurs. »1Stéphanie Genand

Marie Le Moigne est née un soir d’octobre en 1989, elle est enseignante, artiste/auteure. Elle détient un Master 2 en arts plastiques, visuels et de l’espace à L’école de recherche graphique de Bruxelles (Erg). Enseignante en design et métiers d’art depuis 2015, elle poursuit sa pratique artistique et son travail autour des dialogues que peuvent établir les arts visuels et la littérature, l’image, le texte et le langage. Son objectif est de réfléchir et inviter les lecteurs/spectateurs à entrer dans un espace intime : celui des mots et des images. Elle a participé à la collection 2019 du collectif @LustedMen. Elle sera prochainement publiée dans la revue féministe canadienne : « FéminÉtudes ». Par ailleurs, elle a été publié en 2018 et 2019 dans Pica mag, en 2016 dans le fanzine ClitClub. Elle a également été graphiste/éditrice d’un ouvrage de poésie en 2017, et réalisé des auto-publications depuis 2013. Une sélection de son travail d’artiste et de designer est consultable sur son site : marielemoigne.com