Édito du numéro 8

Chaque année, nous publions deux numéros : l’un thématique, l’autre non. C’est le cas de ce huitième opus, qui regroupe des contributions aussi diverses que foisonnantes, toujours autour de l’intime et du politique.

En vrac : un texte écrit par les bénévoles du Planning familial, un entretien sur la fétichisation raciale sur les sites de rencontre gay, une réflexion sur le féminisme comme thérapie politique et une autre sur l’invisibilisation des serveuses. Mais aussi trois poèmes, l’un autour d’un tableau, l’autre de photographies et le dernier qui donne la voix à une infirmière plongée dans un asile. La description enfin d’un laboratoire d’exploration en mixité choisie.

Quelques mots également pour vous remercier de votre soutien moral et financier, qui nous est essentiel, dans la mesure où nous sommes bénévoles et où nous nous refusons à accueillir toute publicité. Pour rappel, vous avez désormais la possibilité de faire un don ponctuel ou bien mensuel.

Bonne lecture !

Mûe : Création d’un espace magique et féministe

C’est quoi ce projet ?

Nous nous sommes rencontrées à la jointure de nos divers appétits pour de multiples arts, au bord de notre révolte en plein réveil, à la souche de notre désir d’éclosion et de transmutation dans ce monde qui n’en n’a pas fini d’être patriarcal. 

A travers Mûe nous avons eu l’intuition que nous pouvions tisser de manière singulière et collective des espaces qu’on a voulu nous faire croire antagoniste / séparés : l’artistique, le politique, le poétique, le féminisme, le magique, le somatique.

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Cosmique

Ton agressivité et ta violence

Tentatives de voler ma peau, de détruire ma joie, d’abîmer mon esprit

En destituant mon corps, en violant mon âme

Tu voulais gagner ma docilité, me discipliner, sans répit

Hyper-vigilante, tétanisée, méfiante

Souffle coupé, vidée, meurtrie

J’ai failli y passer

Mais…non !

Évasion, 

Sidération, moments aphasiques, 

Peinture, gestes muets par dessus le désespoir

Sur le chemin de la convalescence 

Se trouvent des paillettes cosmiques

Toutes couleurs du monde jaillissent des flammes de ma victoire

Renaissance de l’esprit, amour de soi et triomphe avec gloire ! 

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Fétichisation raciale : entretien avec Marc Jahjah

Juliette Lancel : Marc, tu es enseignant-chercheur à l’Université de Nantes en Sciences de l’information et de la Communication, mais tu es aussi bien plus que cela. Comment souhaites-tu te présenter au lectorat d’En Marges !

Marc Jahjah : « Enseignant-chercheur » ce n’est pas tellement réducteur, si on pense cette catégorie au-delà d’un statut professionnel ou administratif ! Certes, c’est de plus en plus compliqué, à cause des réformes qui touchent aujourd’hui l’université : on ne nous demande plus tellement d’accompagner des étudiant·es, de créer un espace où ils/elles viendraient se déplier, gagner progressivement en confiance. Il faut les « former », ou plutôt les aligner sur l’espace marchand et professionnel – cela dit, loin de moi l’idée qu’on devrait défendre des enseignements absolument éloignés de cet objectif ; c’est l’injonction généralisée qui m’interroge, comme s’il ne pouvait ou s’il ne devait y avoir de la place pour autre chose (pour d’autres ciels).

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La profession de serveuse ou l’histoire d’un métier invisible

Les serveuses font partie de ce que l’on appelle les « cols roses » (qui diffèrent des « cols blancs » et des « cols bleus). Ruth Milkman les définit comme un type de travail spécifique aux femmes « mal rémunéré, peu prestigieux et offrant peu de perspectives d’avancement » 1Milkman ; 2014. Le travail invisible ou invisible labor peut être défini comme effectué sans que personne ne s’en rende compte : il n’est pas perçu pour lui-même, la seule chose tangible en est le résultat. Ce travail invisible est souvent genré et, est majoritairement féminin. Celui-ci concerne au départ les tâches domestiques effectuées par les femmes à l’intérieur des foyers. Cependant, il prend aujourd’hui de nouveaux visages. Entrent dans cette catégorie les aides à domicile, les étudiants non rémunérés lors de stage etc…

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Marina 1978

Infirmière venue s’immerger dans l’île asilaire de Léros, Grèce, en compagnie de
l’équipe de Trieste, Italie, où l’on avait imaginé avant la loi l’abolition des asiles.

Le jour où j’arrivai à Léros je remarquai que tout le monde portait le même habit.
Les cuisines étaient pleines
et la peine
n’était pas un affect connu dans le village.
Les paroles brouillaient par leur chaleur la ligne de l’horizon
l’eau scintillait doucement
et les rires montaient au ciel.


Le jour où j’arrivai à Léros je traversai l’île
d’un bout à l’autre.
Je traversai
jusqu’à l’envers du monde.
Là-bas
La mer, le sol étaient pareils
et pourtant tout avait changé.
J’avais fait le passage
et les confins m’accueillaient
en me désorientant.

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Le féminisme comme parcours de soin

Le féminisme est une thérapie politique

On les poussait entre elles, c’était le reste du monde qui préférait qu’elles restent ensemble, que leurs histoires circulent en circuit fermé. Il fallait qu’elles prennent soin réciproquement d’elles-mêmes pour pouvoir être présentables en société, sans faire de vagues. Il ne fallait pas que le viol sorte de ce cercle, qu’il contamine les autres, on faisait semblant de les plaindre mais on les préférait recluses ou éloignées, on les suppliait silencieusement de ne pas en parler en public

Marcia Burnier, Les orageuses
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Au Planning familial, dire et ne pas dire l’intime 

Appel à contribution de la revue En Marges sur l’intime et le politique relayé par une des militantes du planning familial de la Vienne : cette proposition nous parle directement car l’articulation entre  intime et politique est au cœur de nos valeurs, de nos engagements.  

Se dire, se creuser, se dévoiler. 

« L’intime est relatif, il n’y a pas d’universalité, c’est social, donc politique. » 

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Terre de guerres

Le ciel est gris
La terre est grasse 
Comme dans une crevasse
Je m’enfonce dans la fange

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Édito du numéro 7 : Les corps « hors-normes »

Le 21 janvier 2020 avait lieu une journée d’étude organisée par Amélie Téhel et Sophie Barel : « Corps normal, corps idéal ? Enjeux sociopolitiques de la mise en visibilité des corps « hors-normes » ». Entre temps, un partenariat a été noué avec En Marges ! et ce numéro thématique a été conçu. Plusieurs contributions en sont issues, pour lesquelles les auteurs et les autrices ont fait un grand travail de vulgarisation. Il est question d’instabilité résistante, de désir culturel et de lookisme.

Nous avons ensuite lancé un appel à contributions et nous avons été surprises de la quantité de poèmes que nous avons reçus, preuve selon nous d’un besoin certain de prise de parole à cet endroit. Transidentité féminine, non binaire et masculine, fétichisation et grossophobie mêlées, handicap physique ou mental, rapport à soi, les sujets sont divers et passionnants.

Les textes théoriques ne sont pas en reste, avec une analyse d’un roman qui cause transidentité et vampirisme, un auto-entretien sur la surdité et la recherche et une étude de la visibilité des corps considérés comme monstrueux.

Enfin, des œuvres plurielles, mêlant texte et art visuel : corps charnel, modèle vivant et fétichisation du corps racisé.

Chaque année, nous publions deux numéros : celui-ci est thématique, le prochain – à la fin du printemps – ne le sera pas. Vous pouvez d’ores et déjà nous envoyer vos contributions autour de l’intime et du politique.

Quelques mots, enfin, pour vous remercier de votre soutien moral et financier, qui nous est essentiel, dans la mesure où nous sommes bénévoles et où nous nous refusons à accueillir toute publicité. Pour rappel, vous avez désormais la possibilité de faire un don ponctuel ou bien mensuel.

Bonne lecture !