2021, sang menstruel sur papier absorbant et tissu, persienne en bois, acrylique, 50x115cm.
Quand j’ai pris cette persienne, j’ai pensé à cette frontière entre dedans et dehors, entre l’intime et le public. Quand j’ai pris ce tissu, j’avais envie de le tacher de sang menstruel.
Puis je me suis souvenue de cette tradition qui a perduré pendant très longtemps dans les régions du sud de l’Italie. On exposait à la fenêtre le drap avec le sang des femmes lors de leur première nuit de mariage, ceci étant la preuve de leur “pureté”. Un véritable rituel de passage construit sur l’absurde concept de virginité d’une société fortement hétéropatriarcale.
J’ai voulu détourner cette tradition, en me servant du sang menstruel, “impur” par excellence, tout en utilisant une fenêtre, cet endroit entre la maison et le reste du monde. Voir le sang se ramifier dans le mailles du tissu m’a évoqué cette capacité de se propager, de faire passer un message.
Coulère donc : célébrer l’ère où ça va couler sans honte, célébrer la couleur du sang dans toutes ces nuances ou son absence, célébrer la colère et ce qu’on en fait. Cette pièce célèbre tous les utérus et nos sexualités dissidentes.

Née à Bari (Sud de l’Italie) en 1987, ‘Ndrame (Annarita Gaudiomonte) forge son identité artistique entre l’Italie et la France.
Nom pluriel, dans le dialecte de Bari les ndrame sont les entrailles. Ce mot incarne une partie de l’identité géographique et culturelle de l’artiste, mais aussi une manière de créer et de sentir par
cet endroit.
La pratique artistique de ‘Ndrame est basée principalement sur du sang menstruel, notamment pour réaliser des collages et des installations. Des papiers absorbants et des tissus tachés de
sang qui, une fois séchés, sont appliqués sur différents supports. Dans son travail, la relation fait partie du processus artistique: elle récolte son propre sang menstruel ainsi que celui d’autres
personnes, afin de valoriser la pluralité des vécus des personnes menstruées. À travers l’exploration des espaces de l’intime, ‘Ndrame interroge la relation au corps, aux origines et au
vivant dans sa globalité, ainsi que les questions d’inégalité et de justice sociale dans une perspective féministe et queer.
Elle est co-fondatrice de l’association féministe et écologiste Coeur de cagoles, engagé activement dans l’éducation menstruelle à Marseille. Elle vit actuellement entre Montpellier et Marseille.